Une réédition bienvenue: Lord John à nouveau disponible dans la collection « Les Sous-Exposés », aux Éditions « Névrosée »
Un journaliste passionné de bibliographie, Alain Sprauel, a récemment établi celle de jean-Baptiste Baronian pour laquelle il lui a fallu pas moins de 29 pages pour en venir à bout (avec, il est vrai, de magnifiques illustrations des couvertures de certains ouvrages). Cette entrée en matière nous donne l’occasion de situer d’emblée l’envergure d’un écrivain particulièrement prolifique. Caractéristique d’autant plus remarquable qu’il accompagne cette production littéraire d’une multitude d’activités menées au cours d’une carrière dédiée au livre. Editeur (notamment chez Marabout), directeur de collections (avec une prédilection pour le genre fantastique), coordinateur d’anthologies et de dictionnaires (notamment un Rimbaud de référence dans la collection Bouquins ), académicien (il occupe à l’Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique le siège n°28 où il succéda à Thomas Owen), administrateur de plusieurs associations littéraires (PEN Club Belgique, Association des Ecrivains de Belgique, Fondation Maurice Carême), président (et fondateur) de l’Association des Amis de George Simenon…il nous pardonnera d’avoir sans doute omis l’une ou l’autre de ses qualités.
D’un tel homme l’actualité éditoriale est en perpétuelle ébullition. Ainsi, en cet hiver de confinement et de pandémie, les éditions Névrosée ont-elles fait paraître un roman de Baronian, devenu introuvable: Lord John. Le livre s’inscrit au catalogue d’une nouvelle collection de cette jeune maison d’édition: Les Sous-Exposés. La vocation de celle-ci est de rendre à nouveau accessible au public des romans du patrimoine littéraire belge de langue française (on peut lire para ailleurs un article consacré à cette collection et une interview de sa fondatrice, Sara Dombret ).
Accompagné d’une magistrale préface de de Luc Dellisse, le roman initialement paru en 1986, est d’une modernité et d’une allégresse de narration qui pourraient donner à penser que le livre doit son aspect vintage à cette écriture limpide, on dirait « ligne claire » en BD, essentielle, sans lyrisme gratuit ou effets de style démonstratifs. Le jour de ses dix-huit ans le narrateur, Alex, fils d’un bouquiniste bruxellois, à la suite d’un accident cardiaque qui frappe ce dernier, se trouve confronté à une énigme familiale. Qui est ce Lord John dont le vieux bouquiniste bruxellois prononce le nom lorsque son fils vient lui rendre visite à l’hôpital? Qui est cette Capucine dont le jeune homme découvre une familiarité inattendue avec son père? Quel est ce secret de famille dont une tante d’Alex semble être au courant? C’est à cette recherche initiatique que va se livrer le jeune homme jusqu’à ce qu’il identifie, à Gand, le mystérieux Lord John, dissimulé sous de multiples pseudonymes.
Le roman construit sur une charpente de chapitres courts se lit d’une traite. En quelques phrases, une seule suffit parfois, Baronian campe un lieu, un personnage, une attitude avec la précision pointue d’un scénariste de cinéma. Les personnages secondaires apparaissent avec autant de vérité que les protagonistes centraux du récit. Ainsi, à l’hôpital, Baronian nous donne-t-il une vision fulgurante de cette atmosphère singulière qui y régnait au début des années 60.
Et puis, le lecteur se régale des lieux bruxellois qu’évoque Baronian, de la bouquinerie du père d’Alex (l’auteur du roman est un bibliophile passionné!) , du métier de bouquiniste (à l’affut ici des livres de littérature populaire). En suivant Alex, au volant de la Dauphine de son père, sillonnant les rues du centre de Bruxelles, on ne peut qu’être reconnaissant au romancier d’avoir une fois de plus démontré le potentiel littéraire de la capitale belge.
Nous avons profité de cette publication pour interviewer Jean-Baptiste Baronian, et évoquer avec lui, quelques unes des pistes littéraires qu’évoque cette réédition, qui nous met en appétit de relire d’autres oeuvres de celui qui sait si bien, et c’est le cas avec Lord John comme le découvriront les lecteurs à la dernière page du roman, nous donner le goût de lire!
Jean Jauniaux, le 11 décembre 2020.
Ci-dessous le lien vers l’interview de JB Baronian enregistrée le 14 décembre 2020:
Sur le site de « L’ivresse des livres » figurent plusieurs interviews que JB Baronian avait accordées à Edmond Morrel, ainsi que des articles évoquant ses dernières publications. En voici quelques liens:
Jean Ray, biographie , Le bureau des risques et périls, Dictionnaire Rimbaud, Dans le miroir de Rosalie , Biographies Rimbaud et Verlaine (Folio Gallimard), L’enfer d’une saison ,On ne voit pas la nuit tomber , Le mauvais rôle, Le petit Arménien , Le dictionnaire amoureux de la Belgique.
Sur le site de l’éditeur « Névrosée » :
Alex vient d’avoir 18 ans. Son père, bouquiniste à Bruxelles, semble vouloir « passer le flambeau ». Dans une maison qu’il faut vider, il découvre des fascicules colorés, aux titres intrigants. Cette découverte marque le début d’une aventure qui le mènera de l’enfance à l’âge adulte, au cours de laquelle la réalité va s’objectiver, à travers la mort mais aussi l’amour et le désir. Lord John est à la fois une recherche d’identité, un récit initiatique et un roman d’énigme.