« Voyant par tous les temps » un « Article » consacré à Arthur Rimbaud par Rony Demaeseneer

On connaît la collection L’article, imaginée et créée par Maxime Lamiroy qui en assura la direction de rédaction jusqu’à son décès. Le hasard d’une recherche bibliographique consacrée au poète Rimbaud nous a amené à relire une des livraisons de la collection, parue en mai 2023 (et toujours disponible sur le site des Editions Lamiroy).

Nous avions déjà évoqué d’autres titres de la collection, notamment celui consacré par François-Xavier Lavenne à un autre poète, Maurice Carême. En revenant aujourd’hui dans le catalogue de la collection (qui compte pas moins de 51 numéros, dont le dernier consacré à Nicolas Defrecheux et le prochain à Georges Lebouc), force est de constater qu’elle a pris sa place dans les bibliothèques de référence consacrées principalement à la littérature (mais pas seulement). Chaque volume s’inscrit dans la contrainte du petit format, d’une trentaine de pages et d’un maximum de 5000 mots.

Avec son Rimbaud, Rony Demaeseneer (qui contribua aussi au Dictionnaire Rimbaud paru sous la direction de J-B Baronian aux Editions BOUQUINS) démontre combien les contraintes peuvent être autant d’aiguillons bienvenus pour aborder un auteur (fut-il de l’envergure du poète de Charleville) en quelques pages. Le secret? Aborder un point de vue, choisir un angle d’attaque original pour évoquer l’oeuvre et l’homme.

Dans ce numéro 32 de L’Article le point de vue adopté est particulièrement stimulant permettant en quelques pages de renouveler la perception que nous avons chacun et chacune de Rimbaud. C’est à travers « une déambulation météorologique sur les chemins rimbaldiens » que Demaeseneer – qui est aussi poète – aborde l’oeuvre de « l’homme aux semelles de vent ». Dans sa préface-éditorial, Maxime Lamiroy met en évidence le bien fondé du regard porté sur l’auteur du Bateau ivre : « Si la poésie de Rimbaud nous impressionne encore, c’est qu’elle se nourrit de l’espace, ce qui signifie qu’elle s’imprègne des paysages (…) écrits par les fleuves et les ciels »

A travers les saisons et « le temps qu’il fait » l’auteur identifie remarquablement à la fois le temps météorologique que traverse le poète mais aussi le renouvellement constant de son inspiration et l’éternité de l’oeuvre.

On aimerait dès la lecture de cet Article – et de la belle préface de Maxime Lamiroy – arrêter tout et suivre les pas du poète dans les flaques de Charleville, dans la torpeur torride du Harrar, dans l’épuisement de Marseille. Et lire les poèmes bien sûr, mais aussi la correspondance et tous ces livres dont une bibliographie commentée complète l’ouvrage!

Cette livraison de  L’Article est un modèle à la fois dans l’analyse, dans le choix du point de vue (qui permet de « tenir » dans le format) mais aussi grâce à ce bouleversant personnage qui ouvre et clôt le livre consacré au voyant, en lui donnant un « double »…. transformant cette mini-monographie en une vertigineuse nouvelle!

Il est heureux qu’un magazine littéraire comme celui-ci ait été imaginé. Parmi ses multiples qualités, le regretté Maxime Lamiroy devait aussi être « voyant » pour initier et animer une démarche éditoriale originale et généreuse dont on n’a pas encore assez souligné la place singulière qu’occupe son catalogue dans la célébration de la littérature …)

Jean Jauniaux, le 29 janvier 2023