« Le cours de la vie » : le dernier film de Frédéric Sojcher est à la fois une comédie, un film d’amour, un merveilleux portrait de deux personnages mais aussi une magistrale et bouleversante leçon de cinéma. Il sort en salles le 10 mai 2023.
Il n’est pas inutile de rappeler ici que le sort d’un film, c’est à dire son maintien à l’affiche des salles de cinéma, se décide d’après les entrées enregistrées pendant les 2 ou 3 premiers jours de sortie. N’hésitez pas à aller le voir dès les 10 ou 11 mai. Vous transmettrez ainsi aux programmateurs et exploitants un signal fort: celui de donner au film sa chance de rencontrer le public qui, à n’en pas douter, appréciera ce film autant que l’ont fait les spectateurs/spectatrices enthousiastes des projections au Festival du film d’amour de Mons et des avant-premières… (Jean Jauniaux, le 5 mai 2023)
En complément d’un article écrit au lendemain de la projection au Festival du Film d’Amour de Mons, nous vous proposons une interview du réalisateur, une véritable « master class » d’un fou de cinéma…
Véritable leçon de cinéma dans les deux sens du terme, le film de Sojcher s’articule autour de la master class qu’est invitée à donner une scénariste de renom, Noémie (interprétée magistralement par Agnès Jaoui) dans une école de cinéma de province devant la classe réunie par Vincent, le directeur de l’école (Jonathan Zaccaï) qui fut son compagnon au début de leurs carrières respectives. Voilà pour ce qui est la trame du scénario (signé et inspiré du roman d’Alain Layrac) et de la «leçon de cinéma » qui y est racontée aux étudiants, révélant petit à petit combien la réalité s’inscrit dans l’imaginaire, combien elle le nourrit de cette sincérité qui rend la fiction, paradoxalement, si vraie et hypnotique, passant de l’unique à l’universel dans ce « mentir-vrai » si justement formulé par Aragon.
Mais il y a bien davantage. Les films de Sojcher – depuis les premiers courts-métrage jusqu’à celui-ci qui sortira en salle au mois de mai-, construisent au fil des ans une filmographie qui est une profonde et sincère déclaration d’amour au cinéma. Modulée sous différents angles, exaltée par différents genres, explorant à chacune de ses productions cette énigme fascinante qu’est le septième art Sojcher n’en finit pas de célébrer son art. Le cours de la vie est peut-être ce moment incandescent de l’œuvre du cinéaste où, de par son expérience de réalisateur, sa maturité d’artiste, il réussit dans une comédie (que lui envierait Woody Allen s’il venait à la découvrir) à faire du cinéma l’objet sensible de son inspiration jamais prise en défaut. La construction du récit alterne avec grâce les moments d’émotion – une scène d’anthologie évoque le décès du jeune frère de Noémie jouée dans un bouleversant monologue par Agnès Jaoui – et les séquences de comédie mises en place avec une efficacité imparable – la scène de la serviette confondue avec la nappe de la table du restaurant trouvera elle aussi sa place dans les séquences les plus mémorables de l’histoire de la comédie -. Le film joue des différents formats d’image, des références aux genres du cinéma, des dialogues toujours justes, des acteurs et actrices idéalement incarnés pour chacun des rôles. Et, en fil d’or de séquence en séquence, la musique du merveilleux Vladimir Cosma permet d’entendre littéralement les films convoqués par la professeure de scénario pour illustrer sa démonstration, sans en monter les images ! Hommage fervent à l’un des plus grands compositeurs contemporains, Le cours de la vie est ponctué de références allègres aux musiques de Cosma donnant à entendre littéralement les films convoqués par la professeure de scénario pour illustrer sa démonstration, sans en monter les mages !. On ré-entend des fragments d’anthologie, mais on découvre aussi la partition originale du film, ponctuant le récit de l’émotion, la grâce, la drôlerie d’idéale façon. Et puis, revenons-y, il y a cet amour pour le cinéma qui entrelace si étroitement le réalisateur à chaque instant du film dont il exalte le jeu à travers une direction d’acteurs et d’actrices fondée sur la contemplation de leur art.
On sait, par le témoignage que Sojcher en donna dans un livre récent, Je veux faire du cinéma (Genèse Editions) combien la production de ce cinquième long-métrage de Sojcher a été difficile à mettre en place, confrontée à de multiples refus de financement public – malgré la filmographie exemplaire du réalisateur. Gageons que, à l’avenir, le succès du film, sa potentielle carrière internationale, son palmarès et surtout son succès public, effaceront bientôt le souvenir amer de ce chemin d’obstacles. Grâce à l’obstination du réalisateur et la complicité des grands noms du cinéma qui l’ont soutenu dans sa réalisation (le moindre n’étant pas Vladimir Cosma), cette mésaventure retournera bientôt dans les archives de l’administration ou, qui sait ?, donnera à celle-ci une nouvelle dynamique, le goût du risque, de la confiance dans l’expérience et, pourquoi pas, le courage des coups de cœur.
Aujourd’hui, Le cours de la vie nous donne une formidable leçon de cinéma dont le LIFF a été particulièrement bien inspiré de lui offrir cette première sélection pour un film qui décline l’amour avec autant de grâce. L’amour entre Noémie et Vincent, mais aussi l’inaltérable passion d’un réalisateur pour son métier, dont, aux Etats-Unis, Stephen Spielberg a exalté il y a peu, la force irrépressible. Qui sait : Le cours de la vie prendra-t-il bientôt le chemin d’autres festivals, outre-Atlantique ? C’est tout le mal qu’on lui souhaite.
Jean Jauniaux, Mons le 16 mars 2023
Nous mettrons en ligne début mai, une interview de Frédéric Sojcher que nous avons eu l’occasion de rencontrer à plusieurs reprises à l’occasion de la parution de ses livres ou de la sortie de ses films. Cen entretiens et articles sont accessibles en cliquent sur les liens ci-dessous:
les livres aussi:
Scénario et réalisation(avec Luc Jabon)
Je veux faire du cinéma également sur youtube