« La maison » de Marie Klimis (Editions Chloé des Lys)
Un roman est une rencontre entre un lecteur et un univers. Il est aussi une page blanche sur laquelle ce même lecteur ré-écrit l’histoire que le romancier lui propose. Les premiers moments de cette rencontre se construisent par fragments : un titre, une illustration de couverture (par Suzy Taylor en l’occurence), quelques mots biographiques en quatrième de couverture, une phrase lue au hasard de cette « première fois » que le lecteur ouvre le livre, au hasard ou en allant chaque fois à la même page. On dit que Marguerite Yourcenar ouvrait chaque nouveau livre qui lui était envoyé à la page 28. Si ce qu’elle y trouvait la captivait, elle lisait alors tout le livre.
En ce qui me concerne, j’ai ouvert « La Maison » à la page 11 et j’y ai lu la naissance d’un bébé, né d’une prostituée et d’un de ses clients réguliers. Ce bébé allait devenir le protagoniste principal du roman, Clovis Hammeur, dont le destin nous est raconté par une narratrice inhabituelle, la « maison » qui donne son titre au premier roman de Marie Klimis, jeune femme qui déboule en littérature avec un roman inscrit effrontément dans le sillage du « réalisme magique » dont elle aime se revendiquer, avec des personnages aussi improbables que le village (Canon) et l’époque où ils surgissent : une petite fille chevauchant un mouton, un gamin liseur d’histoires qui deviendra écrivain public, Clovis qui par amour fou bâtira une maison pour plaire à sa belle qui jamais ne s’en contentera, Constance cuisinière dont la chère et la chair consolent de tous les chagrins, en particulier lorsqu’elle confectionne des recettes au chocolat…
La liste des inattendus serait trop longue pour la continuer ici. Entrez dans ce roman, laissez vous porter par cette fable dont l’écho résonnera longtemps après la lecture, revenez ensuite au hasard dans tel ou tel chapitre pour vérifier que la magie hypnotique de ce roman, de ses personnages, de son style ne s’altère pas.
On aimerait que Clovis Hammeur, Aurore (la petite fille), Bernard (le mouton), Jules (l’enfant liseur d’histoires), Pierre (le camelot), Horace (le forgeron), Perceval Poulet (l’homme aux oiseaux), Antoine Gredin (le marionnettiste), l’Artiste, Mrs Harrison, Constance (la cuisinière ensorceleuse), et tous les autres,- même les soldats de ces armées qui un jour par on ne sait quelle aberration de l’Histoire décident de faire le siège du village de Canon !,- on aimerait que tout ce beau monde tombe un jour sous les yeux d’un cinéaste de dessin animé ou d’un Tim Burton qui y trouverait certainement matière à inventer une de ces fantasmagories dont il a les secrets et que « La maison » lui inspirerait.
Avant que vous n’entriez dans une librairie pour feuilleter le livre et en lire la page 11, en voici quelques lignes, situées au fond d’une mine de charbon :
« Les mineurs furent surpris de voir une femme enceinte et toute de rouge vêtue parcourir les galeries au pas de course, mais pas un n’osa l’arrêter, intimidés qu’ils étaient par son état et son air furibond.Finalement, l’un d’eux lui indiqua une petite cavité où son amant dormait comme un bienheureux, couché à même le sol. Cela la mit dans une fureur noire. Elle réveilla le jeune homme en hurlant, le secoua, le bombarda de coups de poing et le traita de tous les noms, ses cris résonnant à des centaines de mètres dans les galeries avoisinantes. Elle en était encore à vociférer quand soudain, un voile de terreur balaya son visage et elle porta les mains à son ventre. La colère avait réveillé l’enfant et elle était en train de perdre les eaux.
Clovis Hammeur vit donc le jour sur un tas de sacs de charbon, des mains d’un contremaître édentés aux joues noircies qui pleurait de joie. »
A vous pour la suite, amis lecteurs…
Edmond Morrel, Bruxelles le 20 décembre 2016
Et si les murs pouvaient parler ?
Explorez une mystérieuse maison vivant au rythme des personnages hauts en couleurs qui la traversent. Une petite fille qui arrive à dos de mouton et décide de peindre les lattes du plancher. Un tableau qui pique des crises de colère à faire trembler les murs. Une étrange cuisinière qui ensorcelle les habitants d’un village campagnard. Conte surréaliste, tendre et joyeux, c’est une invitation au voyage pour tous ceux qui ont gardé une âme d’enfant.
Marie Klimis, c’est…
Une apprentie écrivain, une détrousseuse de bouquinistes, une fan inconditionnelle de Romain Gary, une bavarde accomplie, une incorrigible optimiste, une bordélique notoire, une consommatrice assidue de chocolat, une rêveuse invétérée, une grande distraite, une redoutable fourchette et une éleveuse de moutons géants.
Née en 1983 à Bruxelles d’un père grec et d’une mère belge, elle a fait des études de commerce avant de se spécialiser dans la gestion culturelle. Elle vit actuellement en Angleterre où elle étudie le théâtre à la Central School of Speech and Drama. « La Maison » est son premier roman.