« La petite fille qui en savait trop » de Peter May et une rencontre avec l’auteur de la « Lewis trilogy » (en 2014)

La ré-édition d’un des premiers romans noirs de Peter May, « La petite fille qui en savait trop » (Rouergue Noir), nous est l’occasion de franchir à nouveau la porte sonore de notre sonothèque et de ré-écouter l’entretien que Peter May nous avait accordé en 2014. Même si nous n’étions pas à l’époque (2014) en confinement, l’éloignement géographique – Peter May était en tournée de promotion en Australie, avant les USA…- nous avait conduit à une interview par le biais de questions posées par email, et de réponses enregistrées par l’auteur écossais au format MP3… 

Aujourd’hui, nous ferions l’interview par Zoom ou Skype.

« La petite fille qui en savait trop » a été écrit par Peter May à l’âge de vingt-sept ans. En le relisant, avant cette nouvelle édition, il précise: « Je me suis retrouvé en train de dialoguer avec celui que j’étais à l’âge de 27 ans. Je suis persuadé que le jeune auteur aurait contesté certains des changements (mineurs) effectués, mais mes quarante années d’expérience de la vie et de l’écriture ont eu raison de lui. » 

L’envie nous vient de faire une lecture « juxtaposée » de la version de 1981 et de celle de 2020… Quelle formidable master class cela doit constituer.

De même, l’interview dont nous avons dû pré-écrire le déroulement et les questions, avec le recul, constitue aussi une manière de master class. 

Edmond Morrel, le 21 juin 2020 

La recension du livre et l’interview de 2014…

« Lewis trilogy » de Peter May 

(parue en français aux Editions Rouergue)

Au terme de la lecture hypnotique des trois romans de Peter May qui constituent la trilogie écossaise, nous avons contacté Peter May pour un interview. L’emploi du temps et les déplacements de l’auteur de la « Lewis trilogy » nous ont amené à réaliser cet interview à distance. Peter May a enregistré les réponses à une batterie de questions que nous lui avons adressées par courrier électronique. Nous avons laissé ses réponses en anglais plutôt que de les escamoter derrière une « voice over ». A écouter pour mieux apprécier encore l’oeuvre de cet écrivain majeur, qui nous livre ici les clés du travail d’un grand romancier de notre temps.

Edmond Morrel

Précision éditoriale : les éditions du Rouergue ont publié le premier tome de la trilogie écossaise dont les éditeurs anglais n’avaient pas voulu !

Pour faciliter l’écoute de cet interview, nous avons ré-enregitré les questions qui avaient été adressées à Peter May par courriel et que nous reproduisons ici.

Inspiration

Au plus une œuvre est ancrée dans une dimension locale, au plus elle en devient universelle. C’est le sentiment que le lecteur éprouve au terme de chacun des ouvrages de la « Lewis Trilogy », mais aussi au moment de refermer le dernier tome , « The Chess Men »

–                Dans quelle mesure au moment de l’écriture, éprouvez-vous ce sentiment d’aborder des thèmes universels ?

–                Avant d’écrire la « Lewis Trilogy » vous avez co-produit et écrit le scénario (avec votre épouse Janice Hally) d’une série télévisée qui se déroule dans les « Outer Hebrides ». De quelle façon, cette expérience d’écriture a-t-elle nourri la forme littéraire de la « Lewis Trilogy » ?

–                La série « Machair » a impliqué une immersion totale dans l’histoire des Outer Hebrides, plusieurs mois de recherche, de repérages, de castings, de tournage. Dans quelle mesure l’ampleur de ce travail a-t-elle nourri, des années plus tard, votre mode d’écriture de la « Lewis trilogy » ?

–                Entre Machair et la « Lewis trilogy » se situe l’expérience chinoise : à nouveau une immersion dans un univers qui ne vous est pas familier, et l’écriture ensuite de 6 romans qui sont (aussi) un formidable miroir de la réalité chinoise contemporaine. Pourquoi avez-vous eu besoin de cette « parenthèse » chinoise entre vos deux productions écossaises, Machair et la Lewis Trilogy.

–                Avez-vous le sentiment que l’ »exil » chinois vous a permis de mieux saisir la complexité de ce qui allait devenir la « Lewis Trilogy » ?

–                La Chine est un « mégamonde » ; les « Outer Hebrides » sont-elles à dimension humaine ? Sont-elles ainis un « laboratoire » idéal pour observer, avec l’œil du romancier, la complexité de l’homme ?

–                Le milieu, l’environnement naturel des Outer Hebrides sont particulièrement durs et éprouvants. Sont-ils des stimulants pour l’écrivain, créateur de personnages ?

–                On a le sentiment que le décor est un personnage à part entière. Partagez-vous ce sentiment ? L’éprouviez-vous au moment d’écrire ?

Thèmes et personnages

–                Comment naissent vos personnages ?

–                Faites-vous une sorte de « casting » mental avant de commencer à écrire ? Dans quelle mesure vos personnages principaux pré-existent-ils à l’écriture ?

–                Fin Macleod, le personnage central de la trilogie, semble fondamentalement en équilibre instable. Entre son enfance et l’âge adulte, entre l’Ecosse et l’île Lewis, entre la tragédie qui a frappé à jamais sa vie (la mort de son fils) et la vie qu’il aurait pu avoir… Dans quel mesure le personnage s’est-il construit en cours d’écriture ?

–                Dans chacun des romans, vous utilisez pour certains chapitres fondamentaux le recours au « je », à la narration à la première personne. En modifiant ainsi le point de vue sur l’histoire, apprenez-vous davantage sur vos personnages. Est-ce un besoin d’aller dans leur intimité pour arriver à ce que Simenon appelait l’ « homme nu »

–                L’enfance est une époque fondamentale de l’histoire de chacun des personnages, mais aussi de la « communauté » que les personnages formaient dans l’île lorsqu’ils étaient enfants. Cette communauté s’est désagrégée au fil du temps et des épreuves, mais reste un lien fort, puissant, essentiel entre les protagonistes. En quoi cette dimension de l’enfance vous est-elle une source de tension dramatique et narrative ?

–                Parmi les thèmes abordés peut-on identifier celui de l’Eglise ? A la fois comme institution et comme spiritualité. On dirait que s’applique ici à la lettre la phrase d’Anatole France selon laquelle « le plus grand obstacle entre Dieu et l’homme, c’est l’église ». Adhérez-vous à cette proposition dans le cas des Outer Hebrides, telles qu’elles apparaissent dans votre trilogie ?

–                Autre thème qui par moment évoque la pensée et l’œuvre d’Albert Camus, le destin et l’impossibilité pour l’homme d’échapper au tragique. Se trouve aussi, me semble-t-il, la thématique du « libre arbitre » et du mauvais choix. Comment maitrisez-vous le destin de vos personnages ? Les laissez-vous vous guider dans le cheminement narratif ? Vous surprennent-ils en cours d’écriture ? Ont-ils une part de « liberté » à laquelle vous, écrivain, vous acceptez de vous plier ?

L’atelier de l’écrivain :

–                Pourriez-vous nous décrire, si vous en avez, vos rituels d’écriture ?

–                Si vous ne pensez pas en avoir, pourriez-vous nous décrire une journée-type du romancier Peter May ?

–                Quelles ont été les différentes étapes de la construction de la trilogie Lewis, avant l’écriture proprement dite ?

–                Comment se sont construits les personnages récurrents ?

–                Dans vos romans, à la manière des romanciers du XIXeme comme Zola ou Dickens, le lecteur découvre derrière les personnages et leur histoire, la grande Histoire, celle qui d’une certaine manière a forgé aussi leur destin. Dans quelle mesure pensez-vous que le roman a aussi cette fonction-là, de rendre sensible, à travers les individualités, les grands soubresauts de l’Histoire avec un grand H

–                Comment effectuez-vous les recherches documentaires, notamment historiques, sociologiques, ?

Questions d’Edmond Morrel adressées par email à Peter May en août 2014

La trilogie écossaise se compose de

1 : L’ILE DES CHASSEURS D’OISEAUX

2 : L’HOMME DE LEWIS

3 : LE BRACONNIER DU LAC PERDU

Réédition du troisième roman de Peter May

Bruxelles, 1979. Alors que Neil Bannerman, un journaliste d’investigation envoyé par le Edinburgh Post, découvre les us et protocoles de la jeune Communauté européenne, un homme d’un tout autre calibre arrive lui aussi du Royaume-Uni. Ancien combattant des forces armées britanniques, Kale est devenu un tueur professionnel redoutable et s’il a rejoint le continent c’est pour une exécution. Un crime qui serait parfait si une étrange petite fille, incapable de parler ni d’écrire, mais extraordinairement douée en dessin, n’en était le témoin. Tania saura-t-elle donner un visage à l’assassin de son père ? En aura-t-elle le temps ?Peter May lance un infernal compte à rebours dans la capitale belge, cœur de la vie politique européenne, épicentre de tous les jeux de pouvoir. Bannerman, l’Écossais impliqué à son corps défendant dans le meurtre d’un compatriote, pourra-t-il prendre de vitesse un assassin qu’aucune pitié n’a jamais arrêté ? Et, tandis que les autorités belges et britanniques s’acharnent à étouffer une affaire aux ramifications politiques, parviendra-t-il à démêler les motivations du meurtre d’un homme que beaucoup considéraient comme le futur Premier ministre du Royaume-Uni ?