Rencontre avec l’artiste peintre Marie Desaulles

Ecoutez Marie Desaulles au micro d’Edmond Morrel

Interrompant un de ses ateliers dans le Périgord, – elle réunit régulièrement quelques stagiaires chez elle à Saint-Julien de Lampon – , nous avons interrogé Marie Desaulles sur ce qui fait de sa démarche de peintre une approche intuitive de l’art, du tableau, de la peinture. C’est d’une démarche globale qu’il s’agit ici, fruit de nombreuses années de travail, de recherche, de création.

Elle revendique deux « maîtres » en qui elle s’est reconnue lorsqu’elle a découvert leurs œuvres, mais surtout leurs manières d’appréhender la création artistique. Le premier est Nicolas Roerich. Ce peintre russe (1874-1947) auquel un musée est consacré à New York est aussi l’inspirateur de « Pax Cultura », que l’on a coutume d’appeler « La Croix-Rouge de la Culture » et qui a donné naissance au « Pacte Roerich », signé par l’ensemble des états de l’Union panaméricaine en 1935, visant à ce que  « le patrimoine de la culture soit respecté et protégé en temps de guerre et de paix ». En 1954, la Convention de La Haye a complété le dispositif initial. L’autre est Zao Wou-Ki (1920-2013) ami de Pierre Soulages, de Joan Miró, de Henri Michaux un des grands peintres contemporains alliant la tradition orientale aux explorations de l’art contemporain occidental.

C’est de cela et de bien d’autres aspects de son art que nous parle Marie Dessaules dans cet entretien, marqué par ce qui fait son dynamisme d’artiste mais aussi d’animatrice d’ateliers de peinture : « Créer c’est vivre et vivre c’est chercher ».

Nous lui avons demandé de nous proposer, pour illustrer cet article, et cette interview, une œuvre qui permettrait au lecteur de cet article et à celles et ceux qui écouteront l’entretien, de disposer d’un tableau. Celui-ci est intitulé « Liens subtils ». A y regarder de plus près, on décèle dans ces « liens » plusieurs manières de voir. L’astre céleste, suspendu dans l’obscurité ; l’ombre qu’il porte sur l’horizon ; les arbres dont les racines se déploient et s’offrent au regard par transparence : autant d’éléments visuels et symboliques qui étreignent le spectateur d’une émotion esthétique autant que d’une confrontation à une pensée, informulée mais intense. Le jeu des lumières, la matière de la peinture, la plongée vers un horizon obstrué par le globe dont on pourrait penser, par effet de miroir,  qu’il est aussi la pupille d’un œil qui observe celui qui regarde. Est-ce cela le « lien » qu’évoque le titre ? Celui qui relie la toile, le tableau, l’œuvre à celui qui les regarde et se donne la liberté de l’interpréter à sa guise, de l’absorber et de le nourrir de son propre imaginaire, de sa propre fantaisie. Fait-il, cet observateur, racine avec l’arbre qui se dresse, appuyé sur son image inversée. Effet de miroir encore, mais aussi de transparence. La peinture, prétexte à l’exploration de l’inconscient, stimulation du rêve, hypnose bienveillante : c’est de tout cela que nous parle ce tableau, qui est aussi miroir de l’artiste.

Car c’est peut-être cela l’artiste face à sa toile : un être sensible devant un miroir, une infinie d’images possibles dont nous n’avons que des fragments d’instants ?

Sur le site de Marie Desaulles, la page d’ouverture clame : « Il y a urgence à éclairer le visible par la beauté de l’invisible… » .

Est-ce à cette urgence qu’elle nous invite par « l’art qui en un éclair suspend le temps » ?

Sans doute. Mais il y a une infinité de regards portés sur cet éclair, un temps multiplié par le partage… C’est là la générosité de l’artiste que nous prodigue Marie Desaulles…

Edmond Morrel, Juillet 2020