Après plusieurs années consacrées à la traduction littéraire, Emmanuèle Sandron nous revient aux Editions Luce Wilquin, avec un recueil de nouvelles. La quatrième de couverture, comme c’est souvent le cas, nous suggère une lecture bien étroite de ce court volume, bien plus riche qu’une « exploration du désir ». Il y a bien davantage dans cet assemblage structuré et cohérent de récits dont l’épilogue semble réunir les fils. Il les assemble sur le métier des dernières pages, tissant une étoffe faite autant de ce désir évoqué plus haut, que du surgissement de la mémoire enfantine, des peurs et des fantômes qu’elle dissimule. Il suffit, et chacune des nouvelles en est le dévoilement, qu’un mouvement de l’âme, une rencontre, un chant, une fête révèlent en pleine et crue lumière les souffrances endurées. L’écriture est belle, sensible, soutenant la charpente narrative de ce livre émouvant.
Edmond Morrel, le 23 décembre 2015
« Et là je sens que je souris de toute ma bouche, de tous mes yeux, de tous mes cheveux, de tout mon corps. Et j’ai une énorme, une terrible, une folle envie de la prendre dans mes bras, et je me bats contre moi-même et contre le bonheur qui monte, je me bats pour le faire, pour la prendre dans mes bras, et je me bats pour ne pas le faire, la prendre dans mes bras, et je me dis : « Non, non, attends encore, attends encore un peu. Si tu le fais tout de suite, ce sera fait, et le bonheur de la première fois sera derrière toi, il ne sera pas devant toi comme maintenant, jouis, profite de l’idée de ce bonheur qui vient, qui n’est pas encore là, mais qui va arriver, là, maintenant, tout de suite, tantôt, plus tard. »
Sept nouvelles qui explorent le désir, en passant par les cases de l’interdit, de la transgression et de la volupté
Emmanuèle Sandron est traductrice littéraire. Elle co-anime TransLittérature, la revue de l’Association des traducteurs littéraires de France. Elle vit à Bruxelles. « Je ne te mangerai pas tout de suite » est sa première publication personnelle après dix ans de silence et bien davantage de traductions. Elle est l’auteur de « Le double fond », « Celtitude » et « Sarah Malcorps », tous publiés chez Luce Wilquin.