Indispensable cheminement poétique avec le poète et académicien Eric Brogniet.

L’or obscur des chemins, Eric Brogniet, Editions EDERN, Collection « Poétiques »

On connaît la poésie d’Eric Brogniet, ses essais consacrés à la poésie et aux poètes, son dévouement à l’édition des ouvrages de ses pairs. Nous en avons rendu compte régulièrement ici, dans des recensions agrémentées d’entretiens avec l’écrivain. Il vient de publier une postface remarquable à la réédition du roman de Jean-Louis Lippert Mamiwata , roman que l’on a pu redécouvrir lors de la récente Foire du livre de Bruxelles, sur le stand des Editions Edern.

C’est à cette nouvelle enseigne de l’édition belge francophone que le poète publie L’or obscur des chemins . L’ouvrage réunit des poèmes courts glanés dans l’œuvre poétique de Brogniet. L’assemblage de ces scintillements poétiques éclaire comme autant de balises, un cheminement dont chaque pas invite à la rêverie, au songe ou au questionnement. Après une première lecture, le promeneur apprécie mieux l’exergue de Dylan Thomas à laquelle il revient avant de cheminer une nouvelle fois sur les traces de Brogniet: L’obscurité est un chemin, la lumière est un lieu nous glisse à l’oreille l’auteur gallois.

Au fil de la centaine de pages qui composent le recueil, à chacune des lectures, le regard attentif (celui du cœur) se laisse hypnotiser par son incandescence omniprésente (Le feu pulvérisé parle pour nous ). Le mouvement, le foudroiement, la métamorphose et tant d’autres vibrations naissent, sous la plume de Brogniet, d’une maîtrise jamais démentie de la formulation poétique. L’investigation par l’écriture ouvre des mondes insoupçonnés: c’est là son enjeu, son défi et son pari. La parole de la sensation nue est belle comme une bombe à retardement : n’est-ce pas là, dans ce « retardement » de la déflagration que réside la puissance volcanique de la poésie. Les voiles de la liberté, sait-on jamais jusqu’où le vent va les pousser? Et ici, le poète ne nous révèle-t-il pas cette volonté obstinée de quitter l’entrave à chaque instant où la plume se pose sur la feuille?

On pourrait se saisir ainsi de chacune des étincelles surgissant de l’élan créateur, confronté au réel pour s’en extraire dans autant de jaillissements qui lézardent l’obscurité.

Peut-être faut-il alors relire à nouveau le volume, fait d’or, d’obscurité et de chemin, en faisant sienne cette vocation: « Tout poète écrit la déchirure d’être dans le travail du temps.

Voici un livre qui vous deviendra indispensable, nous en faisons le pari!

Jean Jauniaux, le 19 mars 2025