« Les débris du ciel » le nouveau roman d’Eric Brucher.

Nous avons eu l’occasion à plusieurs reprises d’évoquer Eric Brucher dans ses différentes vocations. Il appartient à celles et ceux qui, dans le monde des lettres francophones belges, ne limite pas son champ d’action à sa seule écriture. On le connaît comme « passeur » des oeuvres des autres, que ce soit comme éditeur ou comme animateur de rencontres littéraires (« Le goût des lettres »). Comme éditeur, il anime l’antenne bruxelloise des Editions Weyrich, les Éditions du Sablon dont il est directeur littéraire. Aujourd’hui, avec d’autres auteurs et autrices (entre autres: Patrick Lowie, Eric Brogniet, Stanislas Cotton, Véronique Biefnot etc ) , il participe à l’équipe éditoriale de Asmodée Edern, la maison d’édition créée par Vincent Engel il y a quelques mois. Eric Brucher est une des « ailes » de la nouvelle enseigne: c’est ainsi que sont désignés les écrivains accueillant et développant les manuscrits reçus sur la plateforme d’Asmodée Edern.

Nous avions rencontré Brucher à l’occasion de la réédition, aux éditions du Sablon, du roman « COLOMBE » qui , il y a une dizaine d’années, avait été salué par un remarquable succès public (il fut lauréat de la première édition du Prix Horizon). L’interview qu’il nous accordait alors est toujours accessible dans « L’ivresse des livres » et sur notre chaîne Youtube.

Brucher a ensuite publié dans la même maison le roman Soleil,devant

Le romancier nous revient aujourd’hui chez Asmodée Edern avec un nouveau roman , Les débris du ciel. L’argument est d’emblée, romanesque:  » Lawrence della Rocca , qui a francisé son nom en Laurent Laroche – est guide nature dans une réserve ornithologique en Bretagne. La fin brutale et inattendue d’une relation amoureuse avec Meriem, déclenche un irrépressible désespoir chez le jeune homme. Cette rupture se transforme en métaphore de la dévastation écologique dont il est là aussi le témoin révolté et impuissant. Il décide de quitter son emploi et de partir sur ses deux îles d’origine, l’Irlande ( d’où sa mère, Dorothy, est originaire) et la Corse paternelle.

Brucher trouve dans ce roman une puissance d’évocation à la mesure de la violence des sentiments de perdition éprouvés par Lawrence, narrateur du récit. L’envahissement de la détresse amoureuse déclenche chez lui un de ces mouvements telluriques, nourris autant d’une puissance irrépressible que d’une indéfectible désolation. Cela nous vaut des pages remarquable incarnant la destruction de la nature – la magnifique évocation des Fous de Bassan est digne d’anthologie – , et l’exploration des origines familiales. Il s’agit de « faire deuil » des débâcles dont l’enfant fut le témoin, de dénouer le mystère qui entoure la mort du père (mystère comparable à celui qui entourait la morts d’Antoine de Saint Exupéry) .

Le phrasé lyrique rend hypnotique la lecture du roman qui devrait trouver – nous lui souhaitons – la place qu’il mérite dans la bibliographie de ce genre littéraire si riche et essentiel qu’est le « nature writing » chez les écrivains américains. On lira l’enchantement qu’inspirent au romancier l’observation des oiseaux et des trajectoires menacées de leurs migrations et la magie de leurs envols. Il y a là pour l’écrivain, une source inépuisable de ravissement, source à laquelle il puise l’élan poétique des pages les plus inspirantes du livre.

Lors d’un entretien à bâtons rompus avec l’auteur, nous avons évoqué l’écriture de ce roman mais aussi – (comme nous l’avons fait avec une autre « aile » des Editions Asmodée Edern , le poète Eric Brogniet) – le travail d’éditeur, ce que cette mission apporte à l’écriture, et l’innovation que représente le nouveau modèle éditorial d’Asmodée Edern.

Jean Jauniaux, le 6 octobre 2024.

Sur le site de l’éditeur:

« Lawrence est guide nature dans une réserve ornithologique du Nord et, tel un écho au naufrage écologique, il est ravagé par une rupture amoureuse : Meriem qui cherche avec furie une emprise sur son destin le trouve absolument romantique. À force de compter et contempler les oiseaux, Lawrence ne l’a jamais comprise. Il a besoin de prendre le large, retourner sur l’île de son enfance, la Corse, cette terre où la poussière elle-même est parfumée, selon Antoine de Saint-Exupéry. Au fond, il s’agit d’y achever un deuil : retrouver la tombe d’un père victime d’un accident de vol, à moins que ce ne soit d’un meurtre. Tenter de comprendre en même temps ce que fut la débâcle des parents, qui vingt-cinq ans plus tôt, avaient rêvé de créer là-bas une entreprise agricole aux visées avant-gardistes.
Face à la dévastation, est-il possible de sauver quelque chose, ou de trouver un apaisement? Et si c’était par une attitude poétique, un émerveillement retrouvé : quand la contemplation dessaisit de tout désir de prédation ? »