Artiste humaniste, Marvano interroge autant la science-fiction que l’histoire pour débusquer ce qui fait si souvent et si régulièrement déraper les sociétés humaines vers l’intolérance et la barbarie.
Il vient de publier chez Dargaud le troisième volet de la trilogie « Grand Prix ». Après « Renaissance » (2010), « Rosemeyer » (2011), « Adieu » poursuit le récit de l’entre-deux guerres à travers le prisme des innovations et des recherches en aérodynamisme et performances des moteurs que l’Allemagne nazie entreprend dans le domaine de l’automobile. (Le Traité de Versailles interdisait à l’Allemagne vaincue de développer son industrie aéronautique)
La bande dessinée sous le regard et l’écriture de Marvano devient un instrument d’une redoutable efficacité pour dire l’Histoire, pour en rendre l’apprentissage aussi formateur que passionnant. L’album est aussi un livre « bibliothèque » qui donne l’envie d’aller explorer les livres d’histoire, les journaux de l’époque. Il est aussi un album-sonothèque : ainsi il indique des liens vers des sites où l’on peut aller écouter des ambiances sonores, des musiques , des émissions de radio de l’époque, comme la fameuse adaptation de « La guerre des Mondes » par Orson Welles.
Avec des créateurs et des « raconteurs » de la qualité de Marvano, le devoir de mémoire s’exerce de la plus belle et indispensable manière.
Edmond Morrel
A signaler aussi la sortie en un volume de la trilogie « Berlin ».
Né à Zolder (Belgique) en 1953, Mark Van Oppem débute dans la vie active en exerçant la profession d’architecte d’intérieur. Au bout de quelques années, ses passions de la science-fiction et du dessin prennent toutefois le dessus et l’incitent dès lors à s’orienter vers une carrière d’illustrateur. Sous le pseudonyme de Marvano issu de la contraction de son prénom et de son nom, il illustre d’abord des nouvelles dans Orbit, un magazine hollandais de SF. En 1982, il se résout à rompre définitivement avec son métier d’architecte afin d’assurer la fonction de rédacteur en chef de l’hebdomadaire Kuifje, l’édition néerlandophone du journal Tintin. Quatre ans plus tard, il prend la direction du département bandes dessinées de l’éditeur flamand De Gulden Engel et publie parallèlement ses premières BD dans des numéros spéciaux de Tintin et dans le trimestriel Robedoes +, la version néerlandaise de Spirou Album +. Mais, un projet le hante de plus en plus : celui de mettre en images un récit d’anticipation de l’écrivain américain Joe Haldeman. En 1980, le dessinateur et l’auteur se sont rencontrés et liés d’amitié lors d’une convention de la science-fiction qui se tenait alors à Gand (Belgique) Marvano parvient à convaincre Haldeman d’adapter son roman en BD. De cette collaboration résultera la fameuse trilogie La Guerre éternelle publiée en 1988 et 1989 dans la collection Aire Libre des Editions Dupuis. Cette réussite enthousiasmera Jean Van Hamme. Parlant de Marvano, le scénariste des célèbres XIII et Thorgal dira : « Un dessinateur dont la rumeur persistante dans le Landerneau de la BD prédit qu’il ne tardera plus à faire partie des tout grands ». Cette prédiction va commencer à se confirmer lorsqu’en 1990 paraîtront successivement Le Solitaire scénarisé par Bob Van Laerhoven (Ed. du Lombard) et Red knight scénarisé par Ronald Grossey (Ed. Standaard). En 1991, pour les Editions Dupuis, Marvano entame l’illustration de Rourke, le roman best-seller de Paul-Loup Sulitzer, adapté en quatre albums par Annestay et Rouffa. En 1994, pour la collection Aire libre du même éditeur, il signe en auteur à part entière cette fois, Les sept Nains. En 1996, il renoue avec son ami et complice Joe Haldeman qui conçoit pour lui le scénario de la série Dallas Barr dont la publication se poursuit toujours (Col. Aire Libre- Ed. Dupuis). Cette fructueuse collaboration se reconcrétise maintenant chez Dargaud, avec un prolongement aussi inattendu que saisissant à La Guerre éternelle : Libre à Jamais