Raconter l’intime, c’est à cet exercice narratif que nous invite « Carnation » le roman graphique signé Xavier Mussat chez Casterman
Nous l’avons rencontré et interrogé sur cette inspiration autobiographique qui paradoxalement rejoint l’universel.
Edmond Morrel
Dix ans après la parution du très remarqué album Sainte famille, Xavier Mussat publie la chronique intime d’un amour destructeur. L’autobiographie en bande dessinée à son plus haut niveau.
Au tournant du millénaire. Il est animateur pour le dessin animé Kirikou et la sorcière. Au sein d’un groupe d’amis, il recherche une alternative au contexte morose de ces années 90. Elle débarque à Angoulême, en quête d’un destin artistique. Ils se rencontrent, elle l’attire, elle le repousse, il la protège. Et progressivement, une relation amoureuse s’instaure, intense et exclusive, faite d’attraction-répulsion et de dépendance mutuelle.
Cette relation dévorante va les couper du monde, et un processus destructeur transformera le face à face en un combat aussi bestial que nécessaire. Le couple finira par se déliter, ils se perdront sans s’être jamais appartenu, mais cette rupture annoncera une renaissance. Xavier Mussat a mis dix ans à concevoir puis finaliser cet album dur et poignant, récit d’une grande densité, riche inventions et de ruptures graphiques qui bousculent les codes du genre. Représentant assumé d’une bande dessinée exigeante, radicale et évidemment militante, il a confié à Casterman le soin de publier ce livre à vif. On pense à Louis Calaferte ou à Jonathan Caouette. Et tous apprécieront ce travail minutieux, d’une lisibilité parfaite, qui est aussi le portrait acéré d’une génération idéaliste en lutte avec le réel et les transformations libérales de notre monde.