Jean Muno, Jean-Baptiste Baronian, Horace Van Offel, Jacques Henrard et Georges Rodenbach, cinq « classiques » de la littérature belge en langue française, à nouveau disponibles grâce à la jeune éditrice Sara Dombret.
Ce ne sont pas moins de cinq titres que Sara Dombret remet à disposition des lecteurs, comme nous le sommes, attachés à la valeur patrimoniale de la littérature. La littérature belge en langue française contemporaine souffre d’un manque de visibilité dû aux difficultés qu’elle rencontre à franchir les frontières, en particulier celles du « grand » vosiin francophone, mais aussi, celle qui sépare linguistiquement le Sud du Nord du pays.
Quant à la littérature patrimoniale, elle souffre – jusqu’à aujourd’hui du moins – de ne plus être accessible pour une part importante (si ce n’est par le biais de la collecton « Espace-Nord ») faute d’être ré-éditée et promue.
Cinq titres permettent aujourd’hui de renouer avec les romans de cinq auteurs « classiques » belges francophones: Jean Muno, Jean-Baptiste Baronian, Horace Van Offelen, Jacques Henrard et Georges Rodenbach.
Ces romans sont republiés dans la collection Les sous exposés où ils rejoignent, dans le catalogue des Editions « Névrosée », les Femmes de lettres belges oubliées que Sara Dombret avait déjà publié il y a un an.
Nous l’avions rencontrée alors pour saluer cette aventure éditoriale qui permet de (re)découvrir (entre autres) les noms de Anne-Marie La Fère, Marianne Pierson- Piérard ou Louis Dubrau.
Ce projet éditorial aurait été incomplet s’il s’était limité aux romancières. Aujourd’hui, avec cinq romanciers, Sara Dombret complète une collection qu’elle augmentera encore en ce mois de décembre de deux nouveaux titres de Jacques Cels et Alain Bosquet de Thoran.
Un lancement « en présenciel » était prévu. Hélas, le confinement et les mesures sécuritaires empêcheront la jeune éditrice de présenter les nouveaux ouvrages, ornés chacun d’une préface inédite confiée à des écrivains d’aujourd’hui (Dellisse, Saenen, Delhasse, Baronian)
Le risque existe que faute d’une promotion adéquate, ces livres ne trouvent pas leur public. Mais, comme l’indique Sara Dombret, « Nous ne pouvons pas laisser disparaitre le patrimoine (littéraire belge francophone). Pour (le) maintenir en vie, il ne suffit pas de rééditer des ouvrages. Pour être vivant, un livre a besoin d’être lu. ». Sara Dombret enchaîne : « C’est donc vous qui pourrez faire la différence. C’est vous qui, en lisant ces livres, les sauverez de l’oubli. »
Il n’est pas dans l’intention de la jeune éditrice, qui a elle-même publié un premier roman l’année dernière, de nous inviter à un exercice mémoriel obligé ou fastidieux. La variété des livres qu’elle propose ici, permet à chacun de choisir en connaissance de cause ceux qui l’intéresseront et auquel s’associera un véritable plaisir de lecture. Sur le site de « Névrosée », une brève présentation des cinq romans permet de guider notre choix, ainsi que des extraits (proposés également en version sonore sur la chaîne YOUTUBE de l’éditrice, où on peut également visionner une séquence video de présentation de chacun des ouvrages : https://www.youtube.com/watch?v=6psghLuNMaU&feature=youtu.be ) . Car, et c’est le crédo de Sara Dombret qu’elle avait déjà mis en œuvre pour la collection Femmes de lettres oubliées, « Il ne s’agit donc pas de lire ces livres dans la douleur, mais bien de s’y intéresser et de prendre conscience qu’ils ont encore beaucoup de choses à nous dire et à nous apprendre, ainsi que beaucoup de plaisir à nous procurer. »
Nous avons rencontré Sara Dombret pour une interview sur cette collection, mais également celles et ceux qui y ont contribué en l’agrémentant de préfaces, ainsi que Jean-Baptiste Baronian, qui figure dans la collection à deux titres : préfacier de Jean Muno et romancier, auteur de Lord John un roman devenu introuvable jusqu’à…aujourd’hui.
L’interview figure en video sur YOUTUBE:
Jean Jauniaux, le 2 décembre 2020.
Nous avions déjà rencontré Sara Dombret au lancement de sa collection. Les interviews sont bien sûr toujours accessibles sur www.edmondmorrel.be ainsi qu’une interview de l’éditrice par le regretté Jacques De Decker qui avait salué avec enthousiasme cette initiative tout à fait stimulante. L’interview est disponible sur le site de l’éditrice.
Les titres publiés sont présentés sur le site de Névrosée:
Horace van Offel « Le tatouage bleu«
Préface : Frédéric Saenen
Gabrielle est une femme étrange : à la fois dure et fragile. Qui est cette femme qui sort de prison et semble l’innocence incarnée ? Une femme qui a aimé et qui s’est donnée tout entière à cet amour. À travers son histoire, les reclus de la société retrouvent leur humanité et le milieu carcéral est fortement interrogé. Un roman d’homme qui raconte avec modernité et sensibilité l’histoire d’une femme, ex-taularde, qu’on découvre droite, honnête, fidèle, et qui, par ses actes, remet en question la morale et la société. D’une écriture fluide et sans aucune prétention, mais plein de subtilité Le tatouage bleu bouscule nous principes et nos préjugés. Une œuvre considérable, comparée d’ailleurs à une époque, non sans raisons, à Moll Flanders de Daniel Defoë.
Préface Luc Dellisse
Alex vient d’avoir 18 ans. Son père, bouquiniste à Bruxelles, semble vouloir « passer le flambeau ». Dans une maison qu’il faut vider, il découvre des fascicules colorés, aux titres intrigants. Cette découverte marque le début d’une aventure qui le mènera de l’enfance à l’âge adulte, au cours de laquelle la réalité va s’objectiver, à travers la mort mais aussi l’amour et le désir. Lord John est à la fois une recherche d’identité, un récit initiatique et un roman d’énigme.
Préface de JB Baronian
Fabre est employé au Service des Dossiers en Souffrance, service en trompe l’œil, où rien ne se passe, où rien ne peut se passer, et où les employés, camés d’ennui finissent somnambuliques. Fabre est de ceux-là. Hors de l’enceinte du ministère, rien ne devrait justifier ce recours systématique au sommeil. Pourtant, Fabre s’endort tout le temps, partout : transports en commun, toilettes, en mangeant, en marchant, …Il consulte, mais il n’est pas malade… la doctoresse lui propose la guérison par l’écriture. Avec beaucoup d’humour et d’ironie, Jean Muno nous invite à travers une histoire « déformée » entre réalité et affabulations à ne pas prendre la logique trop au sérieux.
Jacques Henrard « Du bleu dans les nuages«
Préface de Guy Delhasse
Nelly est une femme simple au caractère bien trempé. Propriétaire d’une petite épicerie dans un village oublié où tout le monde se connait, elle observe, écoute et formule ses propres théories sur la vie. Parce que, comme elle dit, elle aime bien « tenir le crachoir ». Petits conflits de voisinages, invasion des « nouvelles résidences », arrivée d’un couple d’« écolos » qui rêve d’une nouvelle vie… Ce sont toutes les dérives de la société que Nelly analyse avec humour et avec cette « sagesse populaire » trop souvent dédaignée. Elle qui n’a pas fréquenté l’école a beaucoup à nous apprendre sur les petites et les grandes choses de la vie. Elle nous rappelle que, malgré tout, il y a toujours du bleu dans les nuages…
Georges Rodenbach Le carillonneur
Préface de Frédéric Saenen
Borluut, architecte à tendance conservatrice et restauratrice est désigné carillonneur de la ville de Bruges à l’issue d’un concours public. Dès qu’il reçoit les clés du clocher, il sent, par une mystérieuse intuition, que son destin est scellé et qu’il entre dans son tombeau. Amoureux du carillon, et de sa ville, il s’éprend également de Godelieve et Barbe, les deux filles de son ami antiquaire Van Hulle, qui incarnent les deux pôles contraires de sa personnalité. Alternativement attiré par l’une et l’autre, il choisira la fougue sensuelle de Barbe, sans cesser de demeurer attiré par la pureté et la douceur de Godelieve. Il y a trop d’absolus dans la vie de Bourluut.