Ecoutez Dany Laferrière, un écrivain majeur, éveilleur de conscience…
Voici un roman émouvant, bouleversant. Voici un roman que vous lirez lentement, qui « provoquera votre silence » selon la belle formule de l’écrivain Haïtien qui identifie les raisons pour lesquelles il a voulu écrire en vers…pour « arrêter le lecteur ».
Le déclenchement du roman est survenu ou surviendra à chacun de nous : l’annonce de la mort du père. Ce moment ouvre le livre par le chant des premiers vers de ce qui devient l’épopée lyrique d’un retour au pays après 32 ans d’exil…
« La nouvelle coupe la nuit en deux,
L’appel téléphonique fatal
Que tout homme d’âge mûr
Reçoit un jour,
Mon père vient de mourir. »
L’auteur dit alors que sa « vie (est)sans destination dorénavant », mais aussi que « la mort de (son) père achève un cycle » et décide de revenir dans son pays natal et de nous donner ces nouveaux « Cahiers d’un retour d’exil » pour reprendre le titre du poème d’Aimé Césaire.
Dany Laferrière évoque aussi dans cet interview l’Odyssée, Sénèque, Henri Miller…Son roman est peut-être la manière qu’il a trouvé, lui, de raconter l’exil, le sien, celui de son père mais aussi celui, le plus terrible dit-il, de sa mère qui est restée au pays. Une manière d’exercer la faculté de tous les Haïtiens, « la faculté de changer en chant toute douleur ».
Dany Laferrière vit au Canada depuis que « le dictateur (l)’a jeté à la porte de (son) pays. » Aujourd’hui, il nous dit : « pour y retourner je passe par la fenêtre du roman ». Et quel roman ! Eblouissant d’émotion, de tendresse, de volonté de vivre et de se battre pour qu’on sache, en chacun de nous, reconnaître ce qu’est Haïti : le combat physique et quotidien pour la survie, « une bataille féroce physique et métaphysique ».
Il écrit au début du livre : « les histoires ne sont ni petites ni grandes, elles sont toutes reliées entre elles »…L’histoire de Dany Laferrière tient de l’universel par la magie de l’écriture qui mobilise les cœurs, l’âme et l’intelligence…
Edmond Morrel