L’index sur la bouche pour nous demander silence et attention, le regard souriant de malice pour nous indiquer qu’il nous convie à une surprise : c’est ainsi qu’apparaît Pascal Vrebos sur la couverture du volume de près de 1.000 pages orné de son nom suivi de « Œuvres théâtrales complètes »…Complètes à la date de la publication faudrait-il préciser car notre homme, comme chaque été sur la terrasse de sa maison de Patmos a écrit en août l’opus 2009. La princesse Camilla lui a inspiré cette vingt-quatrième pièce qui installera la Cour d’Albion au panthéon grinçant de ses personnages.
Oubliez le Vrebos que vous entendez et voyez sur les ondes : ici c’est au vrai Vrebos (si j’ose cette allitération) que nous avons affaire. Dramaturge grinçant et lyrique, il a écrit ses premières pièces quand il avait à peine 17 ans. Paul Willems les saluait déjà qui écrivait à propos de « Tête de Truc » : « J’aime le lyrisme grinçant et tendre qui anime vos dialogues et si les banalités voulues de certaines répliques se souviennnet parfois d’Ionesco, il n’en reste pas moins que le texte va court, du pas de la vraie invention ». Il est un grand auteur de théâtre dont plusieurs pièces ont été jouées et célébrées à l’étranger, là où Vrebos n’est « que » auteur dramatique et où on ne se retourne pas sur son passage dans la rue. Il est aussi un auteur engagé et humaniste. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire le monologue bouleversant intitulé « Le viol d’une petite cerise noire ou d’une griotte ». Il est aussi et surtout, à la manière de Ionesco ou Beckett un fastueux dilapideur de créations verbales, un révélateur d’hypocrisies et de simagrées, un chercheur de vérité derrière les apparences.
Avant d’entrer dans le théâtre de Vrebos, lisez la préface de Jacques De Decker. Jeune professeur à l’époque, il voulut rencontrer le gamin Vrebos lorsque ce dernier obtint et publia un interview de Félicien Marceau. Vrebos avait convaincu l’Académicien, auteur de « L’œuf », de lui accorder une entrevue ! Il avait à peine seize ans…
Il remettra le couvert en 1979, mais c’est à un monstre sacré universel qu’il va s’attaquer : Vrebos prend la direction de Big Sur, pour tailler une bavette avec Henri Miller dans sa maison blanche de Pacific Palisades ! Dans l’entretien qu’il nous a accordé, Pascal Vrebos nous raconte comment Gérard Valet, mis au courant de ce voyage, lui avait prêté son Nagra et enseigné les rudiments de l’enregistrement radiophonique…Cela nous a valu naguère un récit, publié au CRI en 1991 et accompagné d’un CD dont l’éditeur Christian Lutz nous pardonnera de copier un bref extrait… (© Le Cri et © Belfond pour la France).
Rencontrer Pascal Vrebos hors de ses studios quotidiens, c’est découvrir un auteur attachant, intelligent, sensible et profondément humain. Observateur attentif de la condition humaine, il la raconte avec la vraie intelligence de ceux qui ne condamnent pas, mais qui veillent à ne jamais être dupes.
Edmond Morrel
Présentation de l’ éditeur : Le Cri
Les oeuvres théâtrales complètes réunissent les pièces :
LE MOT MAGIQUE / L’AGENDA ORANGE / TETE DE TRUC / REINCARNE-TOI POLYCARPE ! / CYCLOCHOC / YALTA / ENTRECHATS / FOLLIES PARADE / LE MOUROIR DES ALOUETTES / L’IMBECILE / LA PIAULE / L’AVARE II / AH ! QUEL BEAU COUPLE ! / CRIME MAGISTRAL ou l’homme descend du songe / LE DEMON DE MINUIT ex fou d’amour / L’OBSEDE ou la solitude du pénis / LE BIGAME / LE NAIN DE PATMOS / L’IMPOSTEUR / LE VIOL D’UNE PETITE CERISE NOIRE ou d’une griotte / JESSE ET JESSICA / L’EPRISE / LE MONSTRE QUE JE SUIS.
Pascal Vrebos est né à Bruxelles en 1952. Traduit et représenté comme auteur dramatique dans de nombreux pays à travers le monde, il enseigne aussi la sémiologie, la stylistique et l’analyse textuelle au Conservatoire Royal de Bruxelles et à l’Institut Cooremans.
Homme de radio et de télévision (à la RTBF, puis à RTL/TVi et Bel RTL), il est, outre ses pièces de théâtre, l’auteur de multiples publications dont, notamment, Le Gorbatchoc (Le Cri, 1989), Ultimes Entretiens avec Henry Miller (Le Cri, 1991), Apocalypses (Le Cri, 2002)
Il a reçu de nombreux prix parmi lesquels le Prix de la Société des Auteurs et Compositeurs dramatiques, pour l’ensemble de son œuvre, et le « Best ou California » pour Tête de Truc.
Il a acquis la notoriété scientifique et professionnelle en 1994 par un arrêté du Gouvernement. En décembre 1999, le Sénat le nomme membre du Conseil Supérieur de la Justice.