Nous avons rencontré l’éditeur Manuel Carcassonne, directeur général des Editions Stock, qui nous donne son premier livre. Le nouvel auteur est publié chez Grasset.
Un récit drôle, émouvant, emmenant le lecteur à la recherche des racines de l’écrivain.
« L’idée que les mains brunes de mon fils fouillent un jour, au son des pétards de la fête mariale du 15 août, mes ossements français ironiques, et les dispersent au pied du Mont Hermon, où des chiens faméliques les retourneront d’une patte indécise, me rend de bonne humeur. »
Le Retournement tient à la fois de l’archéologie familiale, de la généalogie historique, du questionnement identitaire et de la fouille existentielle : un texte autobiographique qui semble emprunter au genre littéraire de l’autofiction et aux sujets d’actualité (l’identité, le genre, la religion…) pour mieux les subvertir.
Comment le juif honteux de l’enfance est-il rendu à son judaïsme par la rencontre amoureuse avec son double inversé ?
Manuel est un descendant de Juifs alsaciens par la mère et de la communauté judéo-provençale des Juifs du Pape par le père ; Nour est une arabe d’Achrafieh, née à Boulogne, d’origine grecque-catholique. D’un côté, des minorités persécutées; de l’autre, une minorité schismatique et persécutée : la rencontre improbable et fusionnelle de Carpentras et de Beyrouth ! ls ont en partage l’aristocratie des opprimés qui ont retourné la persécution en distinction, mais doivent composer avec des univers culturels si différents que tout leur est sujet de querelle, source d’une histoire d’amour souvent drolatique. Et voilà que celui qui voulait être Swann, à naviguer habilement dans les eaux hostiles du beau-monde (sa belle-famille d’Ormesson par la grâce d’un premier mariage) et du Paris des lettres, se retrouve appelé au Liban « Abou Hadri » : le père d’Hadrien.
L’auteur ressuscite ici les mondes engloutis : les fantômes de sa famille sur laquelle plane l’ombre de morts plus présents que les vivants, le génie de la Jérusalem du Comtat-Venaissin, sa lignée d’ancêtres improbables où Nostradamus côtoie Maimonide et Bernard Lazare donne la main à Adolphe Crémieux.
Placé sous le signe d’une inquiétude mêlée d’ironie, ce récit est la plus merveilleuse réfutation qui se puisse imaginer à l’assignation identitaire qui caractérise nos temps modernes.